10/2023
Faut-il fuir les SCPI ?

Courage fuyons ! C'est le réflexe que pourraient adopter les épargnants lorsqu'ils lisent les articles de presse concernant la baisse du prix des parts des SCPI.
En effet, ces dernières semaines, 6 sociétés de gestion, ont annoncé qu'elles baissaient le prix des parts de leurs SCPI. Qu'est-ce que cela veut dire ?
Rappelons tout d'abord, ce qu'est une SCPI :
Les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) sont des sociétés (SCI) qui collectent de l'argent afin de le placer (P) dans des actifs immobiliers qui seront mis en location. Les loyers nets seront ensuite redistribués aux investisseurs au prorata du nombre de parts acquises de la SCPI.
Comme pour un investissement locatif en direct, le propriétaire des parts de SCPI bénéficie de 2 sources de gains : les revenus (loyers, appelés dividendes pour les parts de SCPI) et les plus-values (augmentation de la valeur des immeubles) matérialisés par la valeur des parts des SCPI.
Par conséquent, lorsque des sociétés de gestion annoncent une baisse de la valeur des parts, c'est parce que des experts indépendants ont considéré que la valeur de leurs immeubles avait baissé de façon significative.
Comment expliquer cette baisse ?
Tout d'abord, il faut préciser que seules 6 sociétés de gestion de SCPI sur 220 environ ont à ce jour baissé le prix de leurs parts. Mais d'autres suivront probablement.
Sur le plan macro-économique, la forte hausse des taux d'intérêt a un impact direct sur la valorisation des actifs immobiliers. En effet, lorsque les placements sans risque comme le Livret A passent de 1% à 3%, les rendements des placements plus risqués comme l'immobilier doivent également augmenter afin de rester compétitifs pour les investisseurs. Or pour augmenter le rendement, il y a seulement 2 moyens : augmenter les loyers (ce qui se fait avec l'inflation) ou diminuer le prix des immeubles. Car le rendement d'un bien est le rapport entre le loyer annuel versé et le prix du bien immobilier.
Sur le plan micro-économique, les 6 sociétés de gestion qui ont baissé le prix de leurs parts sont toutes des filiales de banques (Natixis, BNP, Crédit Agricole, HSBC) qui gèrent de très grosses SCPI. Ces dernières années, elles avaient collecté des montants très importants de d'épargne. Et pour éponger l'excès d'épargne collectée, elles ont acheté à tout-va des immeubles souvent trop chers. Notamment beaucoup d'immeubles de bureaux à La Défense et en région parisienne. Ce secteur, particulièrement les grands plateaux de plus de 1.000 m2 est en souffrance, à cause du télétravail et de la réduction des surfaces louées par les entreprises.
D'autres sociétés de gestion risquent de se trouver en difficulté ces prochaines semaines. Celles qui ont ouvert la collecte aux investisseurs institutionnels. Les investisseurs institutionnels ne gèrent pas comme les particuliers. Ils ont une gestion beaucoup plus active et court-termiste. Certains ont déjà demandé aux sociétés de gestion le retrait de leur part. Or les sociétés de gestion qui n'ont pas ou peu de liquidités vont être obligées de revendre des immeubles (souvent à prix cassé) pour pouvoir "rendre l'argent aux institutionnels". Encore une fois, ce sont les grosses sociétés de gestion, notamment les bancaires, qui sont concernées.
Les sociétés de gestion qui seront épargnées par les baisses de prix de parts sont celles qui ont eu une gestion intelligente.
- Elles ont maîtrisé leur collecte.
- Elles ont ainsi pu attendre de bonnes opportunités pour investir.
- Elles ont diversifié leurs investissements.
- Elles n'ont pas ouvert la collecte aux investisseurs institutionnels.
- Elles n'auront donc pas de problèmes de liquidités liés aux retraits et pourront continuer à investir.
- Elles pourront saisir les opportunités de ceux qui vendent à prix cassés.
- Elles amélioreront ainsi les taux de distribution de leurs SCPI.
Ces sociétés de gestion sont généralement des sociétés indépendantes, qui n'appartiennent pas à de grands groupes bancaires et dont la direction est assurée par le fondateur ou par une équipe dirigeante stable et implantée de longue date.
Alors faut-il fuir les SCPI ?
Poser cette question, c'est poser la même question que pour les actions en période de baisse de marchés. Faut-il fuir la Bourse quand elle baisse ?
Non, les actions comme l'immobilier (à travers les SCPI) sont des actifs de long terme qui font partie de la composition (presque incontournable) d'un patrimoine. Bien sûr, leur proportion est à déterminer en fonction de la situation personnelle de chacun.
Ce sont dans les périodes difficiles qu'on distingue les bons et les moins bons gestionnaires et qu'il faut faire les bons choix.
Donc fuir les SCPI certainement pas. Etre sélectif évidemment !